La Durance se restaure

Depuis plus de 30 ans, le SMAVD est devenu un grand spécialiste des questions de morphologie fluviale. Depuis les grandes crues de 1994, le SMAVD met en œuvre une stratégie de rétablissement du fonctionnement naturel de la Durance, basée sur une approche écologique et morphologique.

LE POINT SUR LA SITUATION

Historiquement, les aménagements de la chaîne hydro-électrique et les extractions massives de matériaux dans le lit mineur de la rivière ont profondément perturbé le fonctionnement naturel de la rivière.

La Durance a ainsi perdu beaucoup de ses fonctionnalités naturelles de rivière méditerranéenne dite en tresses, c’est-à-dire constituées de multiples chenaux se déplaçant fréquemment au gré des crues. Alors que ce type de rivière recèle un potentiel écologique particulièrement rare et qu’il a quasiment disparu à l’échelle européenne, rétablir son fonctionnement en tresses est un point clé de la restauration de l’écologie de la rivière.

Pourquoi agit-on sur la morphologie du cours d’eau ?

La morphologie fluviale consiste en premier lieu à suivre et analyser les évolutions de la forme du lit d’une rivière au travers du temps. Tout le reste du fonctionnement de la rivière étant largement influencé par sa forme, cela permet d’agir en cas de besoin sur les sources d’éventuels dysfonctionnements et traiter leurs conséquences de manière durable.

Le SMAVD est une structure qui procède à ces études en interne depuis de nombreuses années et a déjà conduit de multiples actions concrètes sur le terrain. En agissant sur ce domaine, la Durance retrouve sa biodiversité naturelle, écoule mieux ses crues, devient attractive en générant des espaces naturels et des paysages de qualité, fonctionne en symbiose avec la nappe…

Globalement, la démarche consiste à retrouver une rivière qui fonctionne le plus naturellement possible.

Graphique représentant l’évolution de la Durance sur sa part de rivière en Tresse sur son linéaire, soit +30% des secteurs en tresses en 30 ans.

LA RECHARGE SÉDIMENTAIRE EN DURANCE

Pour passer d’un lit qui méandre (à gauche) à un lit en tresses (à droite)

Après des années d’études, le SMAVD a rendu opérationnel le projet de recharge sédimentaire, dont l’objectif est de redonner à la Durance les graviers qui lui manquent sur de nombreux secteurs afin de mettre un terme aux importants dysfonctionnements morphologiques constatés, et ainsi tendre vers un espace alluvial dynamique, capable de recréer les conditions favorables à un retour durable des fonctionnalités naturelles de la Durance en tresses.

Concrètement, le SMAVD a fait le choix de réinjecter des matériaux à partir de bancs de graviers présents dans le lit mais que la rivière peine à mobiliser. Situés à proximité immédiate de zones en manque de matériaux, le chantier ne nécessitera aucun transport routier.

Ce type de travaux et leur ampleur sont exceptionnels, aussi, dans une démarche qui se veut en partie expérimentale, trois sites pilotes ont été retenus : les secteurs de Puyvert, Charleval et Mallemort. Ils permettront à la fois d’initier la démarche, de suivre les effets physiques et biologiques et sans doute de déployer le projet à une encore plus grande échelle.

Pourquoi la rivière a besoin de graviers ?

Une rivière écoule de l’eau (débit liquide) et transporte des graviers (débit solide) vers l’aval. Pour bien fonctionner, elle a besoin d’un équilibre durable entre son débit liquide et son débit solide. A défaut de suffisamment de graviers, la rivière s’enfonce ou érode ses rives de manière aberrante. Elle perd alors sa forme naturelle et les qualités écologiques associées, et finit par poser d’importants problèmes sur tout le fonctionnement de la vallée : c’est le cas pour certains tronçons de la Durance.

Le SMAVD va ainsi procéder cet été à la réinjection de 100 000 m3 de matériaux sur chacun des deux secteurs de Puyvert et de Charleval. Après une large concertation avec les services de l’Etat, les riverains, les usagers et les élus locaux vient désormais le temps pour les entreprises de travaux publics de démonter leur savoir-faire ! Alors que le temps est compté entre la fin de la période de reproduction des espèces (oiseaux et poissons) et les premières crues potentielles, les engins tourneront à plein régime durant le mois d’août. Comme la rivière recèle de nombreux enjeux à préserver, les travaux s’accompagnent de mesures fortes de préservation des écosystèmes : mise en défends des zones sensibles, gestion des circulations, préservation des poissons, gestion des risques de pollution…

Concrètement, les travaux consisteront en des déplacements de graviers depuis des secteurs hauts et figés (zones en jaune sur les figures suivantes) pour être réinjecter dans le bras principal en eau (zones en rouge).

Quel est la pérennité d’une telle opération ?

Les recharges sédimentaires en Durance consistent à disposer des graviers dans la rivière pour qu’ils soient transportés naturellement vers l’aval. Dans leur parcours, ces graviers vont assurer le bon fonctionnement morphologique du cours d’eau. La pérennité de ces opérations est ainsi à évaluer sur un large périmètre au-delà des lieux de réinjection. Au travers des années l’arrivée des graviers de l’amont, la fluidité du transit sédimentaire et le nombre de crues ayant pu survenir permettront d’évaluer si des travaux complémentaires sont nécessaires. Ce qui est recherché, c’est bien que l’ensemble du lit se transforme, en premier lieu au droit des lieux de réinjection.

UNE OPERATION SOUS HAUTE SURVEILLANCE

Pour des raisons de sécurité publique, les activités de baignade et d’activités nautiques (paddle, canoë) seront interdites au droit des travaux du 1er août jusqu’à leur achèvement complet c’est-à-dire au plus tard le 30 septembre 2022. Les municipalités de Cadenet et Lauris ont également pris des arrêtés interdisant les activités nautiques en amont des chantiers afin d’éviter toute arrivée d’embarcations nautiques sur les passages busés qui permettent aux engins de passer d’une rive à l’autre et qui constituent des obstacles dangereux.

Le SMAVD a évidemment pris le parti de mener cette opération de restauration sans pour autant détruire les richesses écologiques en présence : le choix du calendrier de travaux a été dicté par le calendrier biologique des espèces, des inventaires ont permis de prévoir les évitements des enjeux écologiques présents, des pêches de sauvegarde permettront de déplacer les poissons le temps des travaux…

Les effets attendus de ces opérations de recharge sédimentaire ne seront visibles qu’après la survenue de crues qui déplaceront les graviers. Dans leur parcours ce sont bien les matériaux réinjectés qui feront l’essentiel du travail en donnant naturellement de nouvelles formes à la rivière. Leur action se fera sentir au-delà même des zones en travaux. Elle sera donc évaluée sur plusieurs années grâce à un protocole de suivis mis au point par les experts du syndicat mixte et couvrant près de 20 km.

Pour plus d’informations , consulter l’information complémentaire 

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